par Deborah Rimi
30 janvier 2025
Tous les mois, Janette vous propose une virée insolite pour aller à la recherche de joyaux cachés au Luxembourg. Aujourd’hui, partons à la découverte de Kahler, haut lieu du street art. Niché dans la commune de Garnich, au sud-ouest du pays, le petit village est devenu un véritable musée à ciel ouvert grâce aux peintures murales d’Alain Welter. Il suffit désormais d’emprunter des ruelles bucoliques de la campagne pour admirer toute la magnificence de l’art urbain.
Avec l’intention de valoriser son lieu natal, le jeune artiste luxembourgeois a réalisé plusieurs fresques monumentales à Kahler. Afin d’acquérir le diplôme d’illustrateur, Alain Welter a lancé en 2017 le projet artistique « Make Koler Kooler » dans le cadre de son mémoire de fin d’études. Il a préparé une documentation pour obtenir des subventions ainsi que l’accord de la commune et des riverains. « Ces derniers étaient réticents au début. Cependant, après avoir vu de leurs yeux les premières créations, j’ai gagné leur confiance », nous confie Alain. En collaboration avec d’autres artistes locaux, le graffeur a transformé les façades des maisons et des granges en œuvres d’art aux couleurs éclatantes. Conçues suivant les désirs et les particularités des habitants de chaque immeuble, les murales racontent l’histoire de Kahler.
Les graffs couvrent des murs de très grandes dimensions. « Après avoir familiarisé avec les proportions, j’ai travaillé avec un échafaudage, ensuite, avec une plate-forme élévatrice, qui est beaucoup plus pratique pour des tâches minutieuses et permet d’avancer plus rapidement », explique Alain. 675 bombes en aérosol et 125 litres de peinture ont été utilisés pour la création des différentes fresques murales. « Howdy Farm », la première œuvre d’art créée dans le cadre de ce projet a été dessinée sur le mur d’une grange, car elle représente les valeurs traditionnelles et une caractéristique essentielle du village, telles que la ferme et ses animaux ruraux qui font partie intégrante du paysage de Kahler.
L’artiste a interrogé les villageois pour en savoir plus sur les personnalités originaires du lieu. « Pour le portrait de Felix Jemming, ancien bourgmestre de Garnich, j’ai rendu visite à sa famille pour avoir accès à ses photos. » Ces recherches ont influencé le processus de création et ont permis de concevoir des fresques qui révèlent l’histoire de la localité et de ses habitants. Alain s’est inspiré notamment des armoiries du village pour dessiner les corbeaux du « Koler Hollywood Sign » installé au milieu du champ sur la rue de Garnich. « À Kahler, le cinéma est particulièrement apprécié, d’où mon idée de créer l’installation en bois des cinq lettres de ma localité pour faire un clin d’œil à Hollywood. En 2022, en collaboration avec le « Club des Jeunes Koler », j’ai ajouté à l’enseigne trois corneilles que j’ai dessinées avec la bombe de peinture pour célébrer leur 50ème anniversaire. Cet oiseau héraldique m’a tellement captivé que j’ai décidé de le reproduire récemment sur un mur à Lisbonne. »
Le défi a consisté à intégrer une touche personnelle aux graffitis, tout en préservant l’essence du village. Les représentations artistiques devaient être appropriées au paysage environnant et refléter les caractéristiques du lieu. Pour cette raison, chaque fresque est liée aux spécificités des habitants de la maison concernée. Sur la façade latérale de la maison de ses parents, Alain a peint une grenouille en style hipster. « Je voulais mettre en valeur l’embouchure de la piste cyclable qui se trouve juste à côté de la maison. À l’époque, mon père était d’ailleurs un cycliste passionné. J’ai donc décidé d’illustrer de façon humoristique une grenouille se promenant à vélo en compagnie d’un héron. Aujourd’hui, l’amphibien est devenu un personnage principal de mes œuvres. »
À l’entrée du village, un orchestre, composé de sept singes musiciens vêtus d’habits, accueille désormais les habitants ainsi que les visiteurs avec saxophone, trompette et tambour. « D’origine italienne, les habitants de la maison sont d’ailleurs des musiciens talentueux. L’œuvre s’inspire de la vidéo de musique « Alles neu » de Peter Fox, dans laquelle les musiciens d’orchestre portent un masque de singe. Pour leurs habits, je me suis inspiré des vestes rouges des fanfares militaires, comme celles du groupe allemand, Meute », poursuit Alain. Non seulement les habitations, mais également d’autres établissements ont pu profiter de la créativité de l’artiste. Sur le mur d’entrée du cinéma « Kinoler » sont immortalisés les personnages cultes de la scène cinématographique, tels que E-T, Gandalf et Darth Vader.
Pour stimuler la créativité, Alain s’inspire notamment de la faune et de la flore. Riches en détails, ses œuvres captivent les regards, tout en suscitant la réflexion et l’émotion. Du reste, elles ne manquent pas d’originalité, de finesse et d’élégance. « Pour bien réussir, je commence toujours par esquisser le motif sur le mur avant d’apporter les couleurs. À la fin, je crée encore du volume et des ombres. En général, j’applique la couche de fond avec un « airless », qui permet de pulvériser de la peinture sur de grandes superficies. Ensuite, je fais glisser la bombe aérosol sur la surface à main levée. »
Ce projet a laissé son empreinte sur l’artiste mural et lui a offert l’opportunité de déterminer son propre style. « Comme il s’agissait de mon premier travail d’envergure, j’ai essayé différentes directions avant de trouver la bonne. Aujourd’hui, j’utilise mon art non seulement pour égayer l’espace environnant, mais également pour témoigner des histoires personnelles et stimuler la prise de conscience sur des questions sociales importantes. Mon style figuratif me permet aussi d’exprimer des messages avec un clin d’œil humoristique », conclut Alain. Ainsi, l’artiste a appliqué à un petit village ce que l’on trouve en soi dans une grande ville. Les passants peuvent dorénavant contempler d’énormes graffitis en traversant la campagne. Ce projet audacieux permet de vivre à la fois la nature et l’art, en rapprochant l’observateur de l’histoire rurale du pays.
Il est conseillé de commencer la quête aux graffitis sur la rue Principale, puis de poursuivre sur la rue des Champs.
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