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Fil Rose : Tania, atteinte d’un cancer du sein en 2018, témoigne

par Elodie Lambion

4 octobre 2023

Avec force, courage, émotion et résilience, Tania nous livre son histoire, celle de son cancer, celui qui a chamboulé sa vie en 2018 et avec lequel elle a appris à cohabiter. Plus qu’un témoignage, une leçon de vie sincère et poignante.

« En témoignant, je souhaite donner de la force à celles qui traversent cette épreuve. Je veux aider les autres, les soutenir. »

Tania

« Au fond de moi, je sentais que quelque chose n’allait pas. »

En 2018, j’ai fait une simple mammographie. À la suite de celle-ci, on m’a dit : « Vous avez une masse, revenez dans trois mois. » Au fond de moi, je sentais que quelque chose n’allait pas. J’ai consulté un autre gynécologue, mon généraliste : ils m’ont dit de ne pas m’alarmer. Mais mon sein gauche a commencé à se déformer, j’ai alors demandé un second avis à un autre spécialiste. Ce dernier m’a pris en urgence, il m’a dit que j’avais eu un bon instinct et là, tout s’est enchaîné très vite. 

Sur le moment, étant assez spirituelle, beaucoup de questions me sont passées par la tête : était-ce mon stress ? Mon enfance ? Ma vie d’avant ? Pour moi, ce n’était pas une fatalité. Évidemment, j’avais peur, mais j’étais surtout soulagée d’être soutenue, d’avoir été entendue. 

Une biopsie a rapidement eu lieu. Le plus dur, c’est l’attente qui a duré presque trois semaines. Je me demandais à quel stade j’en étais. J’étais seule avec ma fille, donc c’était compliqué de tout gérer, elle a été très courageuse. Lors de l’annonce des résultats, j’étais avec mon amie : j’avais un cancer de stade 3. Le médecin m’a dit qu’il se guérissait bien, que j’allais subir de la radiothérapie, mais pas de la chimiothérapie. En quelque sorte, j’étais soulagée de ne pas devoir subir cette dernière. Mes proches semblaient plus angoissés que moi.

« Je voulais l’accompagner à partir. »

Le 18 avril 2018, on m’a enlevé la tumeur au mamelon et les ganglions sentinelles. Avant l’opération, je me rappelle que l’anesthésiste m’a dit : « On va l’enlever ce méchant cancer ! » Or, moi, je l’appelais mon bébé d’amour. J’avais fait de la méditation, je comprenais donc pour quelle raison il était là. Pour moi, l’agressivité envers lui n’aurait fait que de renforcer celle-ci. Je voulais donc l’accompagner à partir.

Peu après l’opération, la mauvaise nouvelle est tombée : le cancer était très agressif, j’avais déjà des métastases, c’est-à-dire trois cancers dans le sein. Je devais donc faire face à la chimiothérapie. Cette annonce, c’est comme si on m’avait mise dans une machine à laver à 90°. Je ne comprenais rien. J’étais à plat, je ne m’y attendais pas. 

« Cette émotion m’a beaucoup impactée, mais la maladie et les traitements, je les ai acceptés. »

Le jour où ils m’ont posé le port-à-cath, qu’ils m’ont expliqué la chimio, je subissais la situation. La première fois, en rentrant, j’étais speed : c’était les effets de la cortisone. Le second jour, je n’arrivais plus à parler. Chaque chimio s’accompagnait d’autres effets secondaires. Tout était nouveau, je devais sans cesse me réadapter. La chimio m’a tirée vers le bas. Je pleurais, je riais : j’étais devenue bipolaire. J’étais défigurée, enflée, j’avais la peau sèche, les yeux gonflés, on voyait vraiment que j’étais malade. 

La phase de la perte des cheveux a été rapide. Mes amis s’étaient cotisés pour m’offrir une belle perruque, mais je ne la supportais pas. Sans celle-ci, je me trouvais belle. Il y avait plus d’empathie de la part des autres et j’avais besoin de cela. 

À l’époque, j’ai beaucoup pris les choses à coeur, j’étais énormément dans l’injustice. Cette émotion m’a beaucoup impactée, mais la maladie et le traitement, je les ai acceptés. Je me sentais vraiment abandonnée.

« Il faut demander de l’aide, aussi non, ce n’est pas possible. »

Étant indépendante depuis l’âge de 18 ans, je n’ai jamais rien demandé aux autres. Mais j’ai compris qu’à un moment, il faut demander de l’aide, aussi non, ce n’est pas possible. J’ai donc créé un groupe de 5-6 personnes sur WhatsApp ainsi je pouvais leur faire un message commun à chaque fois que j’en ressentais le besoin. Ensuite, ils s’organisaient pour m’aider. J’ai eu beaucoup de soutien, de relais de la part de ses amis et je les remercie.

« C’était ma manière de lui dire au revoir. » 

Pour dire au revoir à mon sein, le 26 octobre, j’ai organisé une fête en l’honneur de mon anniversaire. J’avais fait faire un gâteau en forme de poitrine. J’ai mangé le sein gauche. C’était ma manière à moi de lui dire au revoir.  Le 31 octobre, il est parti. C’était une drôle de sensation : je voyais les battements de mon coeur. J’ai fait des photos torse nu que j’ai partagées sur les réseaux sociaux, j’ai encouragé les gens à faire des dons pour la Fondation Cancer à l’occasion de mon anniversaire. Je me suis exposée pour donner du courage, apporter un soutien.

J’ai subi 8 opérations au total, car la reconstruction était très naturelle. C’était long, mais je l’ai intégrée progressivement. Par contre, je n’osais pas postuler pour un nouvel emploi, car j’avais peur qu’on me regarde d’un mauvais oeil.

«  D’autres portes s’ouvrent et tout semble se mettre en place. »

En tant que maman célibataire, c’était la sécurité financière, professionnelle avant tout. J’ai voulu utiliser cette expérience pour me reconstruire. J’ai eu envie de me battre pour moi donc je me suis lancée en tant qu’indépendante, j’ai créé Zenergy. C’est complexe de se reconstruire, surtout quand on a touché le fond, mais d’autres portes s’ouvrent et tout semble se mettre en place naturellement. Lorsqu’on est proche de ses tripes, dans la souffrance, on comprend mieux les choses.

Sur le plan médical, je ne suis pas en rémission : je prends des hormones tous les trois mois. Mais dans ma tête, je suis convaincue que tout va bien : j’ai changé ma nourriture, mon mode de vie. Je ne vis pas dans l’angoisse, je suis confiante. J’ai toujours deux phrases dans la tête : soit je joue la victime et tout va mal, soit je transforme cela en positif et tout va bien. 

Pour moi, il y a vraiment un avant et un après le cancer. Maintenant, je peux dire que l’après est une renaissance. Je suis reconnaissante d’avoir eu cette maladie, car ce n’est pas une fin, c’est un nouveau départ. Elle m’a permis de me centrer sur moi-même. Le cancer a fait son travail, il m’a donné un coup de pied aux fesses pour que je transforme ma vie.

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