par Charles Demoulin
8 juin 2025
Vu le nombre de nouveaux romans qui débarquent chaque semaine chez les libraires, il n’est pas toujours facile d’effectuer un choix, eu égard à l’éclectisme des lectrices de Janette. Raison pour laquelle vous découvrirez dans cette rubrique, des propositions de lecture qui se veulent pour le moins assez différentes.
‘La vie en turquoise’, d’Elise Giraudou chez Solleyre poche
Ellie et Louise sont deux sœurs fusionnelles, l’une sportive et solitaire, l’autre coquette et ultra-sociable. Leur vie bascule le jour où Louise apprend qu’elle est atteinte d’un cancer rare des ovaires.
Démunie, Ellie ne sait comment trouver sa place aux côtés de sa petite sœur. Pourtant, elles vont mener ensemble et avec leurs parents, un combat contre cette maladie.
Ce roman à deux voix retrace le quotidien des malades, l’impuissance des aidants, l’humour comme arme de défense, les soignants empathiques, ceux qui feraient mieux de changer de profession, les belles rencontres, les couples qui ne tiennent pas le choc, les amis perdus, les maladresses, l’espoir qui se meurt pour renaître. Le cancer, bien sûr, mais aussi et surtout l’amour sororal inconditionnel qui transcende et sublime tout.
En 2023, Louise décède d’un cancer des ovaires à seulement 23 ans. Sa sœur, Elise, décide de saluer sa mémoire dans un roman bouleversant et criant de vérité sur la maladie, mais aussi sur les aidants et la réalité du monde soignant.
‘La vie en turquoise’ est l’histoire d’un amour entre sœurs, sans faux-semblants. Il n’est pas un cri du cœur autobiographique, mais le résultat de l’inclusion d’une parole mémorielle dans une histoire romancée. Cela pour en alléger la teneur et élargir les réflexions proposées : que vaut l’amitié mise à l’épreuve de la maladie ? Que valent les relations quand le cancer s’invite dans les discussions ? Les tumeurs peuvent-elles contaminer l’affection ?
Le type d’ouvrage, fort de quelque 645 pages, est à ne pas manquer, car, qu’on le veuille ou non, on a toutes et tous été un jour confrontés à ce ‘crabe’ ô combien destructeur… un parent, une amie, un voisin. Sans oublier que demain, on peut, nous-mêmes, avoir soudain affaire à lui.
‘Il pleut un peu, beaucoup, passionnément…’, de Virginie Achard chez Maison.POP
Chance, la quarantaine, est perdue. Par le quotidien, par son couple, par sa vie de famille, par elle-même… Elle n’attend qu’une chose : les vacances d’été pour récupérer ! C’est sans compter sur ce coup de fil qui, la veille du départ, lui annonce que son mari l’a trompée durant un an.
Anéantie, elle décide de partir seule avec ses deux enfants dans la villa du Sud-Est qu’ils avaient louée pour trois semaines. Elle se donne ce laps de temps pour faire le point et recoller quelques morceaux de sa vie éclatée. La météo désastreuse s’accorde avec sa morosité quand soudain elle rencontre une pétillante voisine et des personnages aux caractères bien trempés. Malgré ces bouffées d’air frais, Chance pourra-t-elle se reconstruire en vingt et un jours ?
Un roman ensoleillé malgré une météo capricieuse. Un roman où l’auteur a voulu des personnages authentiques dans des situations bien réelles, et quand la vie peut être à la fois difficile, mais aussi émoustillante.
Un roman où il y a des émotions dans tous les sens, des réflexions anodines qui ne le sont pas tant que ça, des remises au point, des clins d’œil… Bref, un roman qui récrée grandement.
‘La chance de sa vie’, de Sophie Astrabie chez J’ai lu
À presque 40 ans, Stanislas Gélin mène une existence tranquille, trop tranquille peut-être. Un soir, il reçoit un curieux message. Il est signé Sara, la fille dont il était très amoureux au lycée et qu’il avait totalement perdue de vue depuis.
Par quel hasard resurgit-elle dans sa vie ? Elle lui explique être tombée sur l’avis de décès d’un autre Stanislas Gélin, 39 ans et habitant, comme lui, à Dijon. Stanislas, qui n’a jamais aimé les émotions fortes, tombe des nues. Mais la véritable secousse est à venir, avec le retour de Sara dans son quotidien. C’est elle qui va le pousser à enquêter sur ce ‘presque jumeau’ et à considérer que la vie est un jeu que l’on se doit de jouer. Même s’il est risqué.
Un ouvrage écrit par une plume aussi fluide que brillante, aussi poétique que surprenante. Une rencontre inoubliable sous le signe du jeu et du hasard. Un roman joliment tissé qui donne l’envie de tout chambouler afin de retrouver des mots comme : joie de vivre, fantaisie… et bien évidemment chance. La chance de sa vie.
‘Quand elle danse’, d’Anne Teresa De Keersmaeker chez Seuil
C’est à l’aube du 65e anniversaire d’Anne Teresa De Keersmaeker qui sera célébré le 11 juin prochain, que paraît ce livre d’entretiens avec Laure Adler dans lequel la danseuse et chorégraphe évoque son enfance dans la campagne flamande, son éveil aux Arts qui se concrétise par son entrée dans l’école Mudra de Maurice Béjart, puis sa carrière de créatrice chorégraphe, lancée par son séjour formateur à New York.
Elle aborde ensuite les défis et les risques du métier en matière de collaboration, de transmission et d’innovation via son école P.A.R.T.S – Performing Arts Research and Training Studios -, avec des réflexions sociétales et sur la condition humaine qui émergent de ses créations.
On comprend que pour elle la danse est un acte à la fois social, intime et spirituel. On découvre les origines et inspirations paysannes d’Anne Teresa, son attachement à la terre, son engagement dans l’écologie. C’est une artiste fidèle à elle-même, exploratrice incessante de nouvelles voies, de nouveaux gestes, portée par une exigence absolue dans sa démarche.
Anne Teresa de Keersmaeker évoque dans le détail plusieurs de ses spectacles, et notamment le dernier, à venir cet été, autour de Jacques Brel, qui a joué un rôle crucial dans sa création. Anne Teresa De Keersmaeker est une danseuse et chorégraphe belge mondialement connue et célébrée. En 1983, elle crée Rosas, sa compagnie de danse, avant de fonder P.A.R.T.S. en 1995, une école de danse contemporaine reconnue internationalement. À ce jour, elle a créé plus d’une soixantaine de spectacles.
Laure Adler est journaliste de radio et de télévision, biographe, essayiste et éditrice. Elle a réalisé de très nombreux entretiens avec, notamment, George Steiner, Christian Boltanski et Etel Adnan.
Si comme tant de petites filles votre rêve d’enfance était de devenir danseuse, si vous adorez la danse, alors ce livre est fait pour vous.
‘Rendez-vous ici’, de David Nicholls chez Belfond
Marnie est en pleine impasse. Coincée dans son job, dans ses amitiés, dans ses amours, cette correctrice se demande souvent à quel moment sa vie a commencé à se dérouler sans elle.
Michael est en pleine détresse. Depuis son divorce, ce prof de géographie n’a plus goût à grand-chose, si ce n’est aux balades solitaires le week-end. Comment ces deux-là pourraient-ils se rencontrer ?
Grâce à la persistance d’une amie commune. Marnie a besoin d’aventure, Michael a besoin de contacts humains, quoi de mieux qu’une bonne randonnée pour s’aérer la tête. Et c’est parti pour une semaine de marche dans les paysages du Lake District.
Entre dépassement de soi et grands moments de solitudes, hébergements inattendus et pubs miteux, petites disputes et gros fous rires, Marnie et Michael vont se découvrir, se révéler, se décevoir, se surprendre et, quelque part, sur un sentier, se dire que la vie réserve parfois une seconde chance…
Une délicieuse comédie romantique qui dépeint à merveille les illusions perdues, les rendez-vous manqués, la fragilité de l’existence, mais aussi notre capacité à renaître. C’est tout bonnement irrésistible avec ce livre qui va enchanter votre été. Cela tant il est vrai que David Nicholls est un enchanteur hors pair bourré d’humour… très british, il est vrai !
‘Je m’appelle Eva’, de Suzanne Goldring chez L’Opportun – Nisha et Caetera
Nonagénaire discrète, Evelyn Taylor-Clarke vit paisiblement dans une maison de retraite au cœur de la campagne anglaise. Entourée de résidents à l’esprit beaucoup moins vif que le sien, la vieille dame ne tient pas du tout à se faire remarquer.
Mais lorsque sa nièce, Pat, découvre chez sa tante une vieille boîte contenant des photos, des lettres et un passeport au nom d’une certaine Eva, elle se sent obligée de lui poser des questions…
Petit à petit, le voile sur le passé d’Evelyn Taylor-Clarke se lève et révèle une vie bien plus mouvementée qu’elle ne voulait le laisser paraître. Elle a changé de nom, mais certains secrets ne meurent jamais.
Durant la Seconde Guerre mondiale, Evelyn s’est fait appeler Eva. Elle a mené une mission secrète en Allemagne avec pour seul objectif de découvrir la vérité sur la mort de son mari et lui rendre justice… Et ce, quel qu’en soit le prix ! Espionne malgré elle, Eva a risqué sa vie, côtoyé l’ennemi et a réussi à garder ses secrets pendant plus de cinquante ans. Jusqu’à ce que son passé ne la rattrape in extremis !
Ce roman de Suzanne Goldring se veut tout d’abord une belle découverte. On y parle d’amour, de regrets, d’espionnage, de courage, d’amitié. Il y est aussi question de sacrifices et de promesses tenues. Mais il est surtout question d’un roman haletant au possible que vous aurez difficile à lâcher avant le mot fin.
‘L’auberge des destins croisés’ de Juliette Sachs chez Eyrolles
À soixante-treize ans, Lucette étouffe dans son quotidien de femme au foyer. Convaincue qu’il n’y a pas d’âge pour changer de vie, elle quitte son riche mari sur un coup de tête. Divorcée et quasiment sans le sou, cette septuagénaire excentrique investit alors ses petites économies dans une grande maison et en propose les chambres à la location. Objectif : apprendre toujours plus d’expressions de jeunes, et, si possible, retrouver ses vingt ans au passage… au moins dans sa tête.
Au sein de cette auberge espagnole peu ordinaire, les vies de Lucette et de ses pensionnaires vont faire bien plus que se côtoyer : c’est une grande métamorphose collective qui les attend. Karine, la quadragénaire récemment licenciée, Morgane, la tatoueuse rebelle, Nicolas, l’étudiant en biologie qui compose avec son autisme, et Serge, le romancier en retraite d’écriture. Cinq personnages atypiques dont le point commun est de cacher une blessure profonde. Et si, pour guérir, il suffisait de se soutenir les uns les autres ?
Un roman au style feel-good, plein de douceur et de tendresse. Un petit moment de pur bonheur qui nous explique qu’il n’y a pas d’âge pour modifier une route que l’on croyait à jamais toute tracée. Un récit avec lequel on ne s’ennuie jamais tant les émotions, l’espoir, l’humour, les secrets, l’amitié et l’amour sont de tout instant. Bref, une véritable bouffée de fraîcheur.
‘Le jardin dans le ciel’, de Romain Potocki chez Albin Michel
C’est l’histoire d’un fils qui ne parle pas, d’une mère qui parle trop et qui tombe malade. C’est l’histoire d’un caïd qui aime les fleurs, d’une merveilleuse libraire, d’un jardinier moustachu et d’une communauté d’esprits libres.
C’est surtout l’histoire d’une rencontre inattendue avec la littérature, de ces quelques livres magiques qui un jour nous ont sauvés, et de tous ces passeurs qui, sans le savoir, nous ont permis de voyager loin, très loin… On vous explique.
Tistou a 17 ans, il vit seul avec sa mère, gravement malade, dans une banlieue abandonnée aux hommes de main du gitan El Ghaïb. Le jeune garçon n’est pas seulement pauvre et régulièrement humilié, il est aussi bègue.
Un jour Demba, le gardien malien de son immeuble, va lui offrir la clef de sa liberté en lui confiant celles du toit de son immeuble. Afin de faire soigner décemment sa mère, Tistou se lance dans un trafic de fleurs qu’il cultive sur le toit-terrasse de sa tour. De là, il surplombe sa cité et peut même apercevoir la mer… Les fleurs ne serviront d’abord qu’à cacher l’odeur du haschich qu’il va régulièrement vendre au port, au nez et à la barbe du gitan, mais Tistou est de plus en plus fasciné par les crocus d’automne, la bruyère et les roses chantilly.
La rencontre avec Moustache, un jardinier au grand cœur, ancien de la Légion étrangère et Sophie, une libraire iconoclaste, va lui permettre de dépasser peu à peu son handicap et peut-être même le déterminisme social. De boutures en lectures, l’horizon de Tistou s’élargit, mais El Ghaïb entend bien garder la main. S’engage alors une course contre la montre dont le prix pourrait bien être la vie du garçon… ou sa liberté.
Un roman initiatique, aussi drôle que généreux, sur l’extraordinaire pouvoir des livres et de l’amitié. C’est aussi et surtout une autre histoire de la littérature. Le genre d’ouvrage… coup de cœur. Le genre de récit qui ne laisse personne indifférent. Le roman à côté duquel vous ne pouvez passer.
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