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Ces lectures qui nous bouleversent

par Charles Demoulin

18 mai 2025

Cette semaine, le ton sera plus grave, plus sérieux, et vous soumettra sans nul doute à la réflexion. C’est vrai que les romans qui ont retenu notre choix interpellent, et vous arriveront souvent sous forme de coup de poing. Mais n’est-ce pas là aussi la réalité de nos vies ?

‘La fille au pair’, de Sidonie Bonnec chez Albin Michel

Hidden Grove, un domaine privé de la banlieue londonienne. L’immense grille noire s’ouvre sur cinq manoirs, des voitures de luxe et un parc savamment entretenu. Emmylou, une lycéenne d’origine modeste qui a fui sa Bretagne natale pour être fille au pair, a l’impression d’arriver au paradis.
Mais son quotidien se met rapidement à vaciller : le linge sale qui ne cesse de s’accumuler, des pleurs nocturnes à travers les cloisons, des prières murmurées, des rêves effroyables et cette maladie qui touche l’aîné des enfants et dont personne ne parle…

Coupée du monde, Emmylou est entrée dans un piège monstrueux. Pourquoi elle ? Comment s’échapper ? S’inspirant de sa propre histoire, Sidonie Bonnec développe dans ce qui est son premier roman, un suspense psychologique oppressant, où derrière les faux-semblants d’une famille idéale se cache la folie la plus noire. 

Sachez aussi que lorsque vous arriverez au point final de ce roman savamment écrit et à l’ambiance inquiétante, vous n’enverrez jamais plus vos filles travailler au pair en Angleterre.

‘Les Acharnés’, de Marceline Putnaï chez Belfond

Quand Salman, sous le coup de la procédure ‘Dublin’, est expulsé dans un camp de rétention en Roumanie, Georges n’hésite pas à partir à sa recherche.

Lui qui n’a jamais vraiment eu d’attaches, sinon avec les oiseaux des forêts, va rencontrer du beau monde et retrouver le goût de vivre.

C’est l’histoire d’un voyage à travers une Europe malade pour libérer Salman, un jeune migrant afghan détenu en Roumanie. Ce faisant, Georges, garde forestier qui n’attend plus grand-chose de la vie, et Dragos, ex-taulard roumain aussi flamboyant que vieillissant, volent des Clio, collectionnent des otages, enterrent des gens, parlent de Dieu, cueillent des champignons ou dressent des molosses. Ça cause roumain, allemand, russe, dari, tchétchène, hongrois, ça rêve, ça pleure, ça crie, ça hurle, ça picole et ça fornique quand ça peut.

Le récit d’une traversée insensée au cours de laquelle quelques héros bancals, existences foutraques et désespérées, vont réussir, le temps d’un voyage insensé, à retrouver le goût des autres. C’est très singulier comme roman, mais c’est truculent, même s’il aborde avec finesse des thèmes aussi actuels que la migration, l’amitié, les sans-abris… Un récit qui croque une incroyable galerie de portraits. J’ai adoré.

‘Les Acharnés’, de Marceline Putnaï chez Belfond

‘Pourtant c’était ma mère’, de Sylvain Moraillon chez City

Depuis sa naissance, Sylvain vit heureux avec sa grand-mère. Sa mère, trop jeune, lui a confié ce fils dont elle ne pouvait pas s’occuper. Mais à l’âge de 6 ans, tout change  : sa mère décide de récupérer Sylvain pour l’emmener vivre avec elle.

Pour le petit garçon, c’est le début du cauchemar. Alcoolique et dépressive, sa mère ne lui accorde de l’attention que pour l’humilier et le frapper. Pire, son beau-père ne cesse de le maltraiter : les coups pleuvent, au point qu’il a régulièrement des blessures.

Pendant des années, Sylvain souffre en silence. Les professeurs et les voisins savent très bien ce qui se passe, mais personne ne lui vient en aide. Dès lors, il se fait une promesse  : un jour, il partira de cette maison de l’enfer. Un jour, il s’en sortira. Même si le chemin s’annonce long et difficile…

Un ouvrage coup de poing. Un livre qui vous laisse sans voix, car il révèle ce qu’a réellement vécu l’auteur lorsqu’il était enfant. Pourquoi tant de violence, tant de cruauté envers un gamin ? Un gamin qui, plus grand, a trouvé la force d’écrire cet ouvrage qui vous hérisse les poils et dont la fin mérite à la fois tout notre respect et toute notre attention.

‘Pourtant c’était ma mère’, de Sylvain Moraillon chez City


‘Retrouve-moi à Whisperwood’, de Patti Callahan Henry chez fleuve

Les histoires comme les livres retrouvent toujours leur propriétaire. 1939. Hazel, 14 ans, et sa sœur Flora, 5 ans, sont envoyées dans la campagne anglaise pour échapper aux bombes qui pleuvent sur Londres. Afin d’oublier les horreurs de la guerre, elles inventent un royaume magique qui n’appartient qu’à elles : Whisperwood.

1960. La vie de Hazel est bouleversée quand elle reçoit, pour le compte de la boutique de livres anciens où elle travaille, un ouvrage illustré intitulé Whisperwood et la rivière étoilée. Pourtant, Hazel en est certaine, elle n’a jamais mentionné cette histoire devant qui que ce soit. Et Flora, sa chère Flora, a disparu avant même la fin de la guerre, sans doute noyée dans la Tamise.

Ce drame est une plaie toujours ouverte dans le cœur de Hazel. Et, depuis cette découverte, la blessure pulse à nouveau du rythme douloureux de l’espoir.

Assez curieusement, ce roman magnifiquement écrit qui aborde des thèmes aussi variés que la guerre, la famille, le deuil, l’espoir, la guérison, sans oublier ces mélanges de faits historiques et de fiction, porte en lui la magie de ces contes de fées que nos grands-mères nous racontaient le soir à la veillée.

‘Retrouve-moi à Whisperwood’, de Patti Callahan Henry chez fleuve

‘Je n’oublierai jamais ta voix’, d’Élodie Garnier chez HarperCollins

Inséparables depuis douze ans, Alix et Élodie voient leur relation basculer lors d’une soirée arrosée. Sous le charme magnétique de Déborah, Alix succombe à un coup de foudre qui bouleverse sa vie. Par amour pour cette femme, elle quitte tout. Vraiment tout. Y compris son compagnon. Le piège, peu à peu, se referme. Famille, amis assistent impuissants à son isolement.

Plus d’un an après leur dernier échange, Élodie reçoit un appel inattendu qui fait resurgir le passé. Qu’est-il réellement arrivé ? Quels sombres secrets ont conduit Alix à sa perte ? Une quête de vérité s’engage, affectant Élodie à jamais.

Une relation toxique. Une emprise qui consume. Une amitié qui peine à résister. Jusqu’au drame. Un roman prenant, noir, émouvant avec des personnages décrits avec une justesse chirurgicale. Un roman qui vous entraîne page après page dans des histoires d’amour et d’amitié d’une intensité troublante. Un roman profond qui résonne au fond de nous et que l’on gardera longtemps en tête. Le type de roman qu’on recommande à ses amies.

‘Je n’oublierai jamais ta voix’, d’Élodie Garnier chez HarperCollins

‘Retour à Lake Grove’, de J Courtney Sullivan aux Escales

Sur une falaise surplombant l’océan se dresse une maison victorienne. Lorsque Jane la découvre à l’adolescence, elle est abandonnée depuis longtemps déjà. Mystérieuse et fascinante, la demeure devient un refuge pour la jeune fille.

Vingt ans plus tard, Jane, désormais archiviste, revient. Sa vie s’est effondrée et elle est horrifiée de découvrir que les rénovations de la nouvelle propriétaire, Genevieve, ont complètement dénaturé les lieux. Étrangement, Genevieve est convaincue que la maison est hantée. Elle embauche Jane pour trouver des réponses dans le passé de la propriété. En révélant l’histoire des femmes qui y ont vécu au fil du temps, Jane lève le voile sur des pans de l’histoire des États-Unis que beaucoup préféreraient ignorer…

Un ouvrage mystérieux et captivant, subtilement écrit, et avec lequel on se laisse emporter. Un roman poignant qui interroge sur la possibilité de se libérer de ses origines sans pour autant les trahir.

‘Retour à Lake Grove’, de J Courtney Sullivan aux Escales

‘Retour à la vallée des anges’, de Paul Couturiau aux Presses de la Cité

Sébastien, journaliste sportif parisien, se rend souvent à Metz pour raisons professionnelles. Sa rencontre avec Louis, un sans-abri passionné par la cathédrale Saint-Étienne, va changer sa vie. Lorsque Louis disparaît, Sébastien se met en tête de retrouver cet homme dont il ne sait presque rien. Cette quête tourne à l’obsession et le conduit à enquêter sur ses propres racines. Il part alors sur les traces de ses ancêtres italiens et découvre leur rêve du ‘Texas lorrain’ le voyage, l’installation dans la ‘Vallée des Anges’ aux allures d’enfer avec ses hauts fourneaux et la suie sur les façades des maisons.

Il découvre également cette communauté, l’accueil mitigé des autochtones et leur vie au quotidien : les bals populaires, les bagarres, le choc des cultures, le désir d’intégration, et l’histoire de la région avec la naissance des syndicats, la lutte pour la survie de la sidérurgie…En exhumant la vie des siens, ces ‘ritals’ mal aimés qui pour certains ont fui le fascisme, Sébastien met en lumière tout un pan de l’histoire de la Lorraine.

Reste qu’au-delà de ce pan d’histoire par ailleurs extrêmement intéressant et hyper documenté, se pose aussi la question de savoir si l’on peut vraiment échapper à son destin.

‘Retour à la vallée des anges’, de Paul Couturiau aux Presses de la Cité

‘Le Soldat perdu de Jeanne Bonheur’, de Benoît Hopquin chez Seuil

Quand la gamine partait de son rire cristallin, les yeux scintillants, à la fin d’un récit, ça lui faisait du bien, à Anselme. C’étaient des compresses de joie, un cataplasme de bonheur sur son propre désespoir. Il coupait toujours au moment du départ au front.

Et puis, on a été mobilisés et on est partis. Voilà le plus loin où il allait. Il respirait un grand coup. Les mots ne venaient plus. Source tarie. Le silence reprenait ses droits dans la salle, tout épais, tout visqueux. Jeanne butait ainsi chaque fois aux portes du malheur.

La gamine, c’est Jeanne Bonheur : une jeune fille intrépide qui n’accepte pas le mystère entourant la mort de son père Léonce, disparu pendant la Grande Guerre. Vingt ans après, avec Anselme et Clovis, les amis d’enfance et compagnons d’armes de Léonce, paysans du même village, Jeanne part sur ses traces le long de la ligne de front.

À l’issue d’une épopée rocambolesque, elle retrouvera le soldat perdu et renouera avec lui de la plus tendre et étrange des manières.

Dans cet ouvrage à l’écriture soignée, Benoît Hopquin parle de ‘la’ mémoire et de sa transmission. Une transmission que parfois il valait mieux enfouir sous de longs silences. Un ouvrage qui revient sur un passé pour lequel on a tout fait pour l’enterrer.

‘Le Soldat perdu de Jeanne Bonheur’, de Benoît Hopquin chez Seuil

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