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Muse : Bette Davis, regard bleu et tempérament de feu

par Elodie Lambion

4 avril 2023

Première Dame du cinéma américain, ce surnom, Bette Davis le doit indéniablement à son talent, mais aussi à son intransigeance et son exigence qui la caractérisent tant. Parvenue à mettre Hollywood à ses pieds, avec son caractère bien trempé, son franc-parler et ses yeux envoûtants, sa carrière semble immuable.

« Il arrive un moment dans la vie de chaque femme où la seule chose qui aide est une coupe de champagne. »

Bette Davis

SOUS LE FEU DES PROJECTEURS

Le 5 avril 1908, Harlow Morrell Davis, conseil en brevets, et Ruth Augusta, photographe, accueillent leur première fille, Ruth Elizabeth Davis, dans la petite ville de Lowell dans l’État du Massachusetts. Alors qu’elle n’a que 7 ans, ses parents divorcent. Sa mère s’occupe seule de son éducation et de celle de sa sœur cadette, Barbara. Fréquentant la Cushing Academy d’Ashburnham, c’est lors d’une représentation scolaire qu’elle monte sur les planches pour la première fois dans le rôle d’une fée. C’est le déclic : être sur scène, sous le feu des projecteurs, c’est ce qu’elle veut. Le déménagement des trois femmes Davis à New York en 1921 permet à Bette de s’inscrire aux cours de danse de Martha Graham. Mais elle se rend rapidement compte qu’elle ne souhaite pas être danseuse, mais bien comédienne. Elle suit donc des cours de théâtre à la John Murray Anderson’s Acting Dramatic School où elle ne tarde pas à se démarquer par son talent. Dans la ville qui ne dort jamais, c’est Broadway qui va lui ouvrir les portes du succès.

DÉBUTS MOUVEMENTÉS

Après avoir passé de nombreuses auditions à New York, elle intègre la troupe de George Cukor en 1928. Mais le succès n’arrive qu’un an plus tard lorsqu’elle joue dans « The Earth Between » puis qu’elle livre une prestation saisissante dans « Broken Dishes » sur l’une des scènes de Broadway. Remarquée par les studios Universal, elle signe son premier contrat et, dans la foulée, fait ses premiers pas au cinéma dans le film « The Bad Sister ». À la suite de celui-ci, elle enchaîne plusieurs productions, mais elle ne s’y retrouve pas. Pire, les studios Universal mettent un terme à son contrat, car ils la trouvent trop insipide et vont jusqu’à critiquer son physique. Déçue, elle souhaite renouer avec le théâtre en retournant à New York. C’est le comédien George Arliss qui va bouleverser son destin en lui demandant d’être sa partenaire dans le film « L’Homme qui jouait à être Dieu ». En 1932, dans le rôle de Grace, elle se révèle et subjugue les frères Warner qui lui offrent un contrat.

CONSÉCRATION DORÉE

Endossant une multitude de rôles différents – parfois bon gré mal gré – dévoilant toute l’étendue de son talent, les frères Warner commencent à déceler son potentiel. Ils lui confient alors le rôle de la consécration : celui d’une ancienne actrice de théâtre alcoolique dans le film « L’Intruse ». Avec la justesse de son jeu, la profondeur de son regard et son authenticité, elle incarne véritablement Joyce Heath et parvient à bluffer le tout Hollywood. Sa prestation est soulignée et récompensée en 1936 lorsqu’elle reçoit l’Oscar de la meilleure actrice. Le succès la rend exigeante, elle intente même un procès – elle le perdra – à la Warner pour racheter son contrat. Elle sait ce qu’elle veut et se montre intransigeante. Elle refuse même d’interpréter Scarlett O’Hara dans « Autant en emporte le vent », estimant que certains acteurs n’ont pas le niveau. À la place, elle donne la réplique à Henry Fonda dans le film « L’Insoumise ». Là encore, elle excelle et reçoit son second Oscar en 1939. Durant les années 40 et 50, à mesure que les films se succèdent, sa sévérité s’intensifie. Elle décline certains scénarios, choisit même réalisateurs et partenaires. Son franc-parler fait couler beaucoup d’encre, pourtant, c’est lui qui va donner un second souffle à sa carrière.

ENNEMIES JURÉES

À Hollywood, ce n’est un secret pour personne : la rivalité entre Bette Davis et Joan Crawford ne connaît pas de limites. À l’origine de cette guerre : Franchot Tone. Sur le tournage du film « L’Intruse », se donnant la réplique, Bette et Franchot entament une idylle. Mais le clap de fin du tournage y met un terme et quelques mois plus tard, il épouse… Joan Crawford. Cet affront engendre coups bas et piques acerbes entre les deux Américaines. En 1962, leur rivalité inspire les réalisateurs. La fiction rejoint la réalité puisqu’elles jouent deux sœurs ennemies dans le film « Qu’est-il arrivé à Baby Jane ? » Sur le plateau, tous les coups sont permis : Bette installe une machine Coca-Cola puisque le mari de Joan, Alfred Steele, est le PDG de Pepsi, Joan place des cailloux dans ses poches pour être plus lourde lorsque Bette doit la tirer sur le sol sachant que celle-ci souffre déjà de maux de dos, des doublures sont engagées, car elles ont trop peur des blessures physiques qu’elles pourraient s’infliger mutuellement. Même lorsque Joan Crawford décède des suites d’une crise cardiaque le 10 mai 1977, Bette ne fait pas table rase du passé. Elle tient des propos fielleux face à cette tragédie. Elle sera obligée de s’excuser publiquement. Réelle animosité ou façon de faire parler, elles seules le savent. Luttant contre un cancer du sein, Bette continue de tourner pour le grand et le petit écran jusqu’à ce que la maladie l’emporte le 6 octobre 1989. Son regard bleu et son tempérament de feu feront toujours d’elle la première Reine d’Hollywood.

Anecdote

Fascinées par les yeux de l’actrice américaine dans le film « Une femme cherche son destin », Jackie DeShannon et Donna Weiss co-écrivent la chanson « Bette Davis Eyes » en 1974. Enregistrée dans une version plutôt folk, elle sort en 1975 sur l’album « New Arrangement » de Jackie DeShannon. Or, le succès, ce hit le rencontre véritablement en 1981 grâce à la chanteuse Kim Carnes qui le propulse durant 9 semaines en tête des « charts ». Couronnées lors des Grammy Awards, les trois femmes reçoivent roses et remerciements de la part de l’actrice elle-même estimant qu’elles l’ont aidée à rajeunir et à déclencher l’admiration de son petit-fils à son égard.

Biographie

  • 5 avril 1908 : naissance à Lowell dans le Massachusetts
  • 1929 : premiers rôles à Broadway dans « The Earth Between » et « Broken Dishes »
  • 1931 : premier rôle cinématographique dans « The Bad Sister »
  • 1932 : devient la reine des Studios Warner grâce à son rôle dans « L’Homme qui jouait à être Dieu »
  • 1936 : Oscar de la meilleure actrice pour son rôle dans « L’Intruse »
  • 1939 : Oscar de la meilleure actrice pour son rôle dans « L’Insoumise »
  • 1977 : première femme à être récompensée lors des American Film Institute Life Achievement Awards
  • 1987 : reçoit le Kennedy Center Honor pour l’ensemble de sa carrière
  • 6 octobre 1989 : décès à Neuilly- sur-Seine

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