Une bonne graine, qu’est-ce que c’est ?

Vous regardez, dépitée, les trois tomates cerises ou les deux fraises qui ont poussé avec tant de mal sur votre balcon. Pire encore, vous rempotez avec soin et amour persil et basilic achetés en terre à la supérette du coin avant de les voir dépérir en quelques jours. Les raisons à ces échecs sont probablement multiples, mais il suffit parfois de remonter à la base : la petite graine. Ce minuscule grain si précieux, ne pesant souvent pas plus d’un gramme – mais jusqu’à 30 kilos pour un cocotier ! – est plus ingénieux qu’un processeur dernier cri : il a mémorisé, dans son ADN, toutes les données de son passé. Ces quelques grammes renferment des milliers d’années d’histoire et d’évolution. Cette «carte mémoire» va permettre à la graine de s’épanouir si les conditions lui permettent de faire valoir ses atouts. Partant de là, on comprend mieux pourquoi il faut privilégier les graines qui ont du vécu : elles sont plus résistantes, plus résiliantes et ont appris, via le patrimoine transmis par leurs «ancêtres», à s’adapter à plusieurs types de condition. Pour mettre toutes les chances de votre côté, rien ne vaut donc les graines naturelles.

Les graines naturelles

L’appellation a de quoi surprendre : comment une graine pourrait-elle ne pas être naturelle ? C’est encore la main de l’homme qui vient faire toute la différence : à la recherche du légume parfait, lisse, brillant, calibré au millimètre près, bref du légume standardisé – même goût, même taille, même saveur – l’agro-industrie a lancé ce qu’on appelle les graines hybrides, dites F1 pour « Fécondation 1 ». C’est une graine de première génération, sans passé… ni futur. Contrairement à ce que leur marketing prétend, ces graines sont à considérer comme stériles. Les ressemer est hasardeux, autant, parfois, que de les faire germer. Elles nécessiteront quantité d’engrais et de pesticides. Si dans de rares cas l’hybridation peut présenter des avantages, dans ce qui nous intéresse – et d’une manière générale en permaculture ou dans une approche extensive -, on préféra les graines naturelles et, de préférence, bio. On les appelle également « semences paysannes », « graines rustiques », « graines oubliées », « graines locales ». Ce sont des graines dont le patrimoine génétique est stabilisé. 

La bataille des semences paysannes 

En 100 ans, l’industrialisation de l’agriculture a fait disparaitre les trois-quarts de la biodiversité cultivée. Dix multinationales contrôlent désormais 75 % du marché mondial de semences, la plus célèbre étant Monsanto. 75%, c’est aussi le chiffre alarmant des graines aujourd’hui perdues, un répertoire d’ADN façonné sur des millénaires par la nature. Pour les carottes, alors qu’existaient 400 espèces, plus que très peu sont plantées. Or ces graines ancestrales sont une vraie chance face aux défis climatiques : certaines sont moins gourmandes en eau et en pesticides que leurs consœurs F1 arrosées d’engrais. Faire vivre des graines naturelles, c’est aussi soutenir la diversité génétique agricole et l’alimentation des générations futures.

Où trouver de bonnes graines ?

Dans les fruits et les légumes ! C’est tellement évident qu’on en vient à l’oublier ! Evidement, ça ne fonctionnera pas, ou moins bien, avec les fruits F1 de l’hypermarché (souvenez-vous, vos fameux noyaux d’avocat…). Attention, certains produits bio sont aussi issus de graines F1, le label n’est pas une garantie. Si vous n’avez pas le fruit parfait à portée de main, de nombreux groupes sur les réseaux sociaux proposent des échanges de graines entre particuliers. Au Luxembourg, l’association SEED (Semences pour l’Entretien et l’Evolution de la Diversité) pourra également vous aiguiller.