« Bleu à la lumière du jour »

par Charles Demoulin

28 novembre 2023

Dans un château, à une époque indéterminée, mais qui pourrait très bien être celle du Moyen Âge, vivent deux sœurs. Ce soir, alors que les hommes sont partis à la chasse, l’aînée, Teresa, organise la fuite de Mathilde, sa benjamine, promise à un sacrifice rituel.

Alors que Mathilde s’apprête à traverser la forêt, elle est soudain rejointe par un oiseau bleu qui va lui indiquer la manière de s’échapper de ce bois. Chose étrange, cette sortie se trouve au fond du lac devant lequel la jeune fille se trouve arrêtée. Qu’importe, puisque c’est par là qu’elle doit quitter les lieux, Mathilde s’y enfonce petit à petit, jusqu’à disparaître corps et âme.

Alors que le temps passe, un corps sort soudain des profondeurs de l’onde et s’en retourne vers le château à nouveau accompagné par l’oiseau bleu. Est-ce Mathilde ? Le lendemain, dans les murs de cet espèce de forteresse, la vie semble avoir repris un cours normal, si ce n’est cette atmosphère étrange qui semble y régner.

C’est vrai que suite au départ des hommes pour la chasse, les femmes, demeurées désormais seules, mis à part un jeune garçon, vont faire face à des révélations quant à des relations familiales pour le moins troubles, mais également à des récits d’inspiration gothique écrits par Teresa, la sœur de Mathilde. Et la jalousie de s’installer, mettant en exergue certains travers des unes, mais également et surtout, l’oppression féminine.

Dans ce conte tour à tour fascinant et inquiétant, où fantasmagorie et onirisme se conjuguent à merveille, la place doit être entièrement laissée à l’imaginaire. Entrecoupé de cases muettes laissant place à la contemplation, le récit fait également la part belle à des atmosphères nocturnes particulièrement envoûtantes. Quant à l’absence d’yeux, de nez et de bouche dans le visage des personnages, il renforce plus encore l’étrangeté émanant de cette histoire intemporelle. 

‘Bleu à la lumière du jour’, de Borja González chez Dargaud