‘33, Place Brugmann’, d’Alice Austen chez Seuil

« Je suis face à notre immeuble, assez loin dans le square, alors je le vois tout entier. J’adore ce bâtiment. (…) Je sais que c’est sa symétrie qui a plu à papa : deux appartements identiques à chacun des trois étages, un autre au rez-de-chaussée face à un vaste hall, haut de plafond, mais austère, et la chambre de bonne tout en haut, au quatrième étage. La façade de brique, les balcons de pierre, les épais murs extérieurs donnent l’impression d’une forteresse susceptible de résister à tout ce qui vient du dehors, et d’une certaine façon, elle l’est. Le 33, place Brugmann est un monde en soi. »

Charlotte Sauvin, étudiante en art élevée par son père architecte, connaît tous les détails de l’immeuble et de ses habitants : les voix qui résonnent dans l’escalier de marbre, le pas de son ami Julian Raphaël, le fils de la famille du marchand d’art, de l’autre côté du couloir ; le son du saxophone dont joue le jeune Dirk au premier ; ou encore les disputes du gardien et son épouse au rez-de-chaussée…

Puis les Raphaël disparaissent, laissant derrière eux tous leurs biens sauf leur inestimable collection d’art, qui s’est simplement évaporée. Tout se fracture alors dans l’existence jusque-là paisible de cette petite communauté. Savoir à qui on peut faire confiance devient une question de vie ou de mort.

Un premier roman certes bien documenté. Une histoire d’amour, un mystère et surtout un casse-tête philosophique, racontés par la chorale de voix singulières des habitants de l’immeuble de la place Brugmann à Bruxelles, durant la Seconde Guerre mondiale. Un premier roman où s’entrecroisent bien des personnages.

‘Les amants du Ragnarök’, de Jean-Laurent Del Socorro chez Albin Michel Imaginaire

Le Ragnarök approche, ou si vous préférez, la fin du monde. L’hiver, long de trois ans, touche à sa terrible conclusion. Thor, fils d’Odin, a eu une vision : celle de sa mort prochaine.

Parce qu’elle refuse de s’y résoudre, son épouse, la géante Iarnsaxa, entreprend la plus périlleuse des quêtes, dans un monde où la mort et la vie se confondent désormais. Elle se joint à Jórunn, une scalde aveugle en route vers la Valhalle pour faire ses adieux à son amante tuée lors d’une des batailles qui font rage dans les royaumes humains. Ensemble, la géante et la musicienne n’auront d’autre choix que d’affronter le Ragnarök.

Après ‘Morgan Pendragon’, l’auteur s’attaque ici à la mythologie européenne, et la Nordique en particulier. Avec grand talent, et surtout une écriture magnifiquement descriptive, il nous offre une bien belle histoire truffée d’émotions en tout genre et de destins tragiques. Un vrai régal pour les amoureuses du genre.

‘Mort ou flic’, de Bénédicte Gilles et Gaëlle Sheehan chez Belfond

Bénédicte a toujours eu honte : son arrière-grand-père, Pierre Fratani, était policier pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle a toujours été persuadée qu’il avait collaboré avec les nazis. Mais qu’en était-il vraiment ? Qu’est-ce que ça voulait dire, être flic sous Vichy ? 

Dans ‘Mort ou flic’, Bénédicte Gilles et Gaëlle Sheehan mènent l’enquête. Tout le monde n’a pas la chance d’avoir eu un papi résistant. Mais lorsque Bénédicte Gilles découvre que son arrière-grand-père, Pierre Fratani, a été flic sous l’occupation et accusé de collaborationnisme, elle est partagée entre la colère et la honte. Profondément choquée, la journaliste engagée ne peut s’empêcher de s’interroger.

Comment un jeune corse rebelle et communiste a-t-il pu collaborer avec les nazis ? Qu’est-ce que cela signifiait que d’être flic sous l’occupation ? Que signifie être flic hier et aujourd’hui ? Accompagnée d’une collègue journaliste, Gaëlle Sheehan, Bénédicte décide de mener l’enquête.

Qui était Pierre Fratani ? Tout en découvrant l’histoire de ce jeune Corse idéaliste devenu flic un peu par hasard, c’est toute l’histoire de la philosophie du maintien de l’ordre en France qui est explorée ici, des lois vichystes à la guerre d’Algérie : comment passe-t-on de l’esprit de résistance de 1945 à la guerre d’Algérie ? De Mai 68 aux gilets jaunes et à la mort de Nahel ? Et surtout, comment lutter et comment résister? Un récit-enquête à la fois biographique et historique où, derrière une histoire à la fois banale et follement romanesque d’un tout jeune homme, pointent les questions du fondement de notre système de valeurs, et de justice.

‘Entre leurs mains’, d’Annelise Heurtier chez Casterman

Elles affirmaient que c’était la seule façon de chasser le Malin qui s’était installé en nous. C’est l’histoire de Deirdre, de Sinead, et de milliers de jeunes Irlandaises enfermées derrière les murs d’un couvent. C’est l’histoire de ces femmes condamnées pour avoir eu le tort d’être la proie des hommes. C’est l’histoire d’un jeune homme qui écoute et prend conscience qu’il porte en lui la même violence. C’est l’histoire de la lumière au milieu de la souffrance.

Inspiré de l’histoire vraie des Couvents de la Madeleine, l’un des plus grands scandales de l’Irlande du 20ᵉ siècle, cet ouvrage, d’une rare puissance, voit l’auteure aborder avec une incroyable délicatesse, non seulement la cruauté de ce type d’institutions de l’époque, mais également le fait que la société, pourtant bien au courant des faits, se voilait pieusement la face.

‘Les filles de la chocolaterie’, de Giacinta Cavagna di Gualdana chez HarperCollins

Il n’y a pas de sacrifices quand on aime.  C’est avec ces mots qu’Olga Torri accepte de devenir l’épouse de Luigi Zaini et la mère de ses deux enfants, qui ont récemment perdu leur mère.

Luigi est un homme gentil et discret avec un grand rêve, une chocolaterie milanaise. Entre cuves et mélangeurs, machines à griller et à refroidir ou encore tables d’emballage, l’entreprise Zaini s’agrandit. Elle offre surtout une véritable maison et une chance de rédemption à ses ouvrières, les nombreuses ‘tuse’, en milanais ‘les filles’, qui, avec leurs mains froides, ne font pas fondre le chocolat.

Zaini est une famille et, comme toute famille, lorsque Luigi meurt prématurément en 1938, elle se rallie autour de la figure maternelle, Olga, qui fait preuve d’un courage qui la surprend elle-même. Les années surviennent avec leur lot d’obstacles, mais entre le rationnement et les bombes qui pleuvent sur Milan, cette petite, mais grande entreprise survit, et dans les rues milanaises se diffuse le parfum du chocolat.

Une histoire d’amour, de sororité. L’histoire vraie d’une grande famille remplie de joie. Un best-seller italien rempli de personnages féminins attachants. Mais aussi une découverte de villes comme Milan ou Varèse. Un petit régal, ce chocolat !

‘Alien – La guerre du sexe’, de Gwendal Fossois chez L’Opportun

Quand, en 1979, ‘Alien’sort au cinéma, c’est un choc esthétique et culturel pour le grand public et la critique. Devenue culte, la saga de Ridley Scott met en scène l’actrice Sigourney Weaver qui va très vite cumuler les distinctions pour son interprétation du personnage d’Ellen Ripley.

Toute première héroïne de science-fiction dite badass, Ripley est une figure féministe emblématique. Unique survivante humaine du ‘Nostromo’, son personnage est forcé de survivre dans un univers létal particulièrement masculin, et participe, encore aujourd’hui, au succès de la saga.

Innovant, ‘Alien’l’est en tout point de vue ! Le féminisme dans cette saga est indéniable : domination masculine, patriarcat, normes et dénonciations… Cet ouvrage décrypte les bouleversements induits par l’univers de Ridley Scott.

Laissez-vous embarquer à bord du Nostromo pour ce grand voyage aux sources d’Alien… En fait, laissez-vous embarquer pour le triomphe du féminin.

‘Les roses de Monsieur Constant’, de Lyliane Mosca aux Presses de la Cité/Terres de France

Retour aux sources pour Automne Chaussin, lieutenante de police de trente-deux ans, envoyée à Semur-en-Auxois, en Bourgogne, pour enquêter sur le meurtre d’un directeur de collège retraité, Constant Ribière.

Elle connaît bien la région : elle est native d’un village proche qu’elle a quitté à la suite d’un drame. Sa sœur Arabelle a été tuée par un chauffard six ans auparavant, laissant une petite orpheline, Prunille. Automne commence ses investigations tout en espérant faire d’une pierre deux coups et retrouver le chauffard.

Les interrogatoires se succèdent dans la ville en émoi où plusieurs personnes entrent en scène : la journaliste Julie, toujours à l’affût d’un scoop, Fleur, excentrique au grand cœur, Chantal, la femme de l’adjudant, Emma, la maîtresse de Constant. Lui qui écrivait un livre sur les habitants de la commune, aurait-il contrarié quelqu’un ?

Si grâce à la plume aussi émouvante que rythmée de Lyliane Mosca, vous allez être plongées dans de superbes paysages de la Bourgogne, vous allez surtout tenter de démêler en compagnie d’Automne, le pourquoi de deux morts tragiques, alors qu’aux alentours les langues ne se délient pas facilement.