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Ces BD qui vous attendent

par Charles Demoulin

18 octobre 2024

Tout comme pour la littérature, c’est également l’heure de la rentrée pour les éditeurs de BD. Et croyez-moi, les nouveautés s’avèrent abondantes, avec déjà, çà et là, quelques jolies petites pépites. À ce propos voici quelques titres qui pourraient réellement retenir votre attention.

‘LA FILLE AUX CHEVEUX TURQUOISE’

Je vous parlais de pépites, en voilà déjà une. Un petit bijou de poésie. Un de ces bonbons que l’on savoure longuement et avec délectation. Une BD incroyable, émouvante, tout en douceur et d’une beauté graphique puissante, lumineuse et délicate tout à la fois. Une BD sublime qui va droit au cœur. Une BD qui sort des sentiers battus et dont on se régale.

Toscane 1871. Giovannina, une petite fille de 7 ans, vit sur le magnifique domaine d’Il Bel Riposo, la propriété des Lorenzini où son père est jardinier. Un jour, alors qu’elle se cache après avoir commis une bêtise, elle est soudain découverte par Carlo. Carlo, le fantasque frère du propriétaire, traumatisé il est vrai par la mort de sa petite sœur Marianna.

Carlo est journaliste et écrivain sous le pseudonyme de Collodi. Entre ces deux êtres que tout sépare – âge, sexe, statut social, connaissance de la vie… – va pourtant naître une improbable amitié qui durera toute la vie et même au-delà de la mort. Amitié qui donnera naissance à l’un des chefs-d’œuvre de la littérature italienne et mondiale : Pinocchio. Comme quoi une rencontre insolite peut transformer une vie à tout jamais.

‘La fille aux cheveux turquoise’, d’Elena Triolo chez Anspach

‘L’OGRE OUBLIÉ DE SAINTE-BARBE’

Sous ce titre se cache le cinquième et dernier volet de la série consacrée à ‘Lucien et les mystérieux phénomènes’. Une série jeunesse qui avait pour but de scruter et d’analyser les problèmes qui agitent de plus en plus notre société. Une série dont le dessin, très linéaire, mais qui tablait surtout sur l’effet ‘ambiance’, s’adapte à merveille au récit. Au-delà, on pointera aussi le dossier d’idées créatives sur le lien entre l’humain et son environnement qui se trouve en fin d’ouvrage.

Un récit où les habitués de la série vont retrouver Lucien, Violette et leurs amis. Une petite bande qui passe les vacances d’été dans leur village. Devenus aujourd’hui plus grands, ils peuvent désormais s’aventurer dans la ‘crique interdite’, nommée ainsi par les adultes en raison de ses marées dangereuses.

Ce sera pourtant l’inquiétante silhouette d’un homme qui va les effrayer. D’autant que la légende explique qu’un ogre imprévisible et particulièrement cruel hante les lieux. Mais comme des cris et des hurlements se font entendre chaque nuit, la curiosité de Lucien et de Violette va être piquée au vif et les pousser à enquêter. Et ce qu’ils vont découvrir sera bien plus précieux que ce qu’ils imaginaient.

‘L’Ogre oublié de Sainte-Barbe’, de Delphine Le Lay et Alexis Horellou chez Casterman

‘SA MAJESTÉ DES MOUCHES’

Autre petit chef-d’œuvre que cette adaptation en BD, et ce de façon exemplaire, du roman culte de William Golding : ‘Sa Majesté les mouches’. Un roman qui fête aujourd’hui ses 70 ans et qu’Aimée de Jongh a décidé d’être la première à le mettre en bande dessinée. Non seulement l’adaptation est d’exception, mais le style graphique adopté par la Hollandaise est parfaitement en adéquation avec un récit où l’adulte ne trouve place que dans les trois dernières des 340 pages que comporte cette petite merveille.

Suite au crash de leur avion, une bande de garçons de la haute société anglaise échouent sur une île déserte. Livrés à eux-mêmes, vu la mort de tous les adultes présents à bord, ils sont bien décidés à jouir de l’absolue liberté qui s’offre à eux. Et ce d’autant plus dans un cadre qui leur apparaît aussi enchanteur qu’idyllique. Afin de s’organiser, ils confient à Ralph, le rôle de chef.

Sauf qu’un autre garçon prénommé Jack défie son autorité et prend la tête d’un groupe de dissidents qui entendent lui, valoriser la force physique. Tandis que les nuits des deux groupes sont peuplées de cauchemars provoqués par la présence hypothétique d’une créature monstrueuse, leurs journées sont bientôt rythmées par nombres de conflits. Violence et brutalité prennent vite le pas sur l’utopie des premiers jours.

‘Sa Majesté des mouches’, d’Aimée de Jongh chez Dargaud

‘CALAMITY JANE’

Lorsqu’elle arrive à Deadwood en juillet 1876, Martha Jane Cannary est déjà connue par son surnom de ‘Calamity Jane’. Comme à son habitude, l’aventurière vit au jour le jour, boit sans retenue, et raconte ses exploits réels ou fictifs à qui veut bien lui offrir un verre. Ayant connu une enfance misérable dans le Missouri du milieu du XIXe siècle, elle a bâti son mythe de son vivant : celui d’une femme libre se moquant des convenances sociales dans un monde essentiellement dirigé par les hommes.

Tantôt cuisinière et lingère dans la maison close de son amie Dora, tantôt conductrice d’attelage ou encore infirmière lors d’une épidémie de variole, elle fascine par son franc-parler, son excentricité et son courage, autant qu’elle dérange et fait scandale. Pourtant, face à l’adversité, elle demeure égale à elle-même : une femme au grand cœur, éprise de liberté, et qui n’hésite pas à venir en aide aux déshérités et aux souffreteux. Ce qui lui valut un autre surnom, celui de ‘l’ange de la miséricorde’.

Si le scénario de Marie Bardiaux-Vaïente tente de démêler la réalité de la légende de ce pur produit de la conquête de l’Ouest que fut Calamity Jane, le dessin de Gaëlle Hersent s’avère aussi d’une belle efficacité. Tout cela sans oublier l’excellent dossier qui clôt cet album et qui est signé de la plume de l’historien Farid Ameur.

‘Calamity Jane’, de Marie Bardiaux-Vaïente et Gaëlle Hersent chez Glénat/fayard 

‘M-A-D  UN EMPIRE DE ROUILLE’

Ce titre générique de ‘M-A-D’ vous embarque dans une nouvelle série originale et très ambitieuse qui mêle intelligemment une intrigue géostratégique de fond aux soubresauts émotionnels de Daïa, l’héroïne de ce qui devrait être une longue et incroyable saga. Daïa qui tout au long de l’intrigue, interroge les limites de la conscience humaine

Dans les ruines d’une Russie qui n’a plus rien d’un État, l’humanité a survécu à grand-peine à la guerre qui l’a opposée aux mechams. Elle a appris de ses erreurs et n’entend plus conférer de l’autonomie aux robots. À présent, les troupes d’élite de Novgorod sont composées d’un humain partageant sa conscience avec un robot.

Daïa est l’une de ces ‘spirits’, et Socrate est son ‘psybot’. Ensemble, ils vont outrepasser les directives de leur direction et enquêter sur la mort de Sofia, une spirit tuée et démembrée par un mecham. Ils enquêteront parce que Sofia comptait pour Daïa, mais également parce que Daïa hait viscéralement les êtres synthétiques… alors même qu’elle partage sa conscience avec Socrate, l’un d’entre eux. Après tout, le paradoxe est le propre de l’humain…

Un univers style Mad Max. Un dessin réaliste qui percute. Une intrigue qui vire au polar. Une BD qui n’a pas fini de faire parler d’elle et qui, selon Nicolas Jary, le scénariste, veut animer les débats sur l’IA, cette fameuse intelligence artificielle. Un premier tome plus que prometteur et à conseiller vivement à tous les amateurs du genre.

‘M-A-D Un empire de rouille’, de Legrain et Jarry au Lombard

‘LA FRANÇAISE DOIT VOTER’

Cet album est largement concentré sur la lutte menée par Louise Weiss afin que les Françaises puissent enfin obtenir le droit de vote. Nous sommes en 1944, moment où elle a multiplié les actes spectaculaires en utilisant la presse pour arriver à ses fins. Mais Louise Weiss a aussi utilisé la seconde partie de sa vie à la création de l’Union européenne, car elle était constamment à la recherche de la paix et du pacifisme dans le monde.

Née le 25 janvier 1893 à Arras et morte le 26 mai à Paris, Louise est une journaliste, femme de lettres, féministe et femme politique française. Elle sera notamment doyenne des députés au Parlement européen (1979 à 1983). Mais avant d’obtenir le droit de vote pour les femmes françaises, Louise Weiss et ses alliées se sont succédé au combat. Avec d’autres femmes pionnières, elle s’est battue avec un acharnement incroyable pour arriver à ses fins. 

Ce récit bien documenté écrit par Marie-Christine Moinard reprend par le début la vie de Louise Weiss. Et ce afin de nous faire comprendre la singularité de cette femme qui était à la recherche permanente de la paix et du pacifisme. Au-delà, on mettra en exergue le trait et les coloris tout en finesse de Marie Tumelaire. Une belle découverte historique !

‘La Française doit voter’, de Marie-Christine Moinard et de Marine Tumelaire chez Marabulles

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