par Vanessa Schmitz-Grucker
5 avril 2022
Pour celles qui se seraient arrêtées à Dragon Ball Z, l’oeuvre de Sabrina permet d’aller plus loin en ouvrant les portes d’un univers mêlant la tradition des contes de fées et la modernité des mangas. Rencontre et découverte.
Comment êtes-vous arrivée au manga ?
J’ai toujours aimé dessiné depuis petite, mais mon vrai rêve était plutôt de devenir écrivain. C’est donc très naturellement que j’ai commencé à illustrer mes histoires. C’est ainsi que j’ai découvert, en 2005, le manga, qui m’a prouvé qu’il permettait d’aller beaucoup plus loin que le roman illustré.
C’est tout un univers que vous vous êtes construit…
C’est vrai qu’au lycée, en suivant les mangas à la télé avec mes amis, on a créé nos propres personnages, un peu gothique Lolita, japonais baroque. J’étais, d’ailleurs, identifiée comme « la fille manga ».
Combien de mangakas êtes-vous au Luxembourg ?
On se compte sur les doigts d’une main. Il y a davantage d’auteurs de BD avec qui nous partageons notre communauté des amis du 9ème art.
Pour se lancer dans le manga, faut-il toute une culture associée ou cela peut-il s’improviser ?
Personnellement, je suis complètement en « mode impro ». J’ai suivi quelques mangas célèbres mais les influences se croisent vraiment avec, par exemple, Harry Potter et ou le Monde de Narnia.
Quelle est la différence entre un manga et une BD ?
C’est difficile à expliquer. Il y a le sens de la lecture (la première fois que j’ai ouvert un manga, j’étais complètement perdue !), le style graphique mais aussi la façon dont on construit une page. J’ai beaucoup de respect pour la BD, mais pour moi, il y a trop de cases sur une page, c’est trop petit, trop comprimé. Le manga utilise l’image différemment : on peut réduire un personnage à ses yeux pour zoomer sur une émotion, on peut mettre l’accent sur un court instant développé sur deux pages, par exemple.
Le manga est-il populaire au Luxembourg ?
Il y a eu un vrai boom du manga, je le remarque quand je vais dans les écoles, certains sont vraiment à 1000% dedans alors que, dans ma classe nous étions peut-être 3 à suivre quotidiennement Naruto. Aujourd’hui, les rayons mangas sont bien fournis, on a même des librairies spécialisées comme Le Réservoir à Luxembourg-Ville.
Comment est venue l’idée de « manga-iser » les contes d’Andersen ?
J’avais de moins en moins de temps pour fignoler des scénarii. Je suis aussi tombée sur « La psychanalyse des contes de fées » de Bruno Bettelheim. J’ai découvert les messages cachés derrière les contes et j’ai voulu les expliciter dans des mangas. Le Tome 1 est sorti en 2019, je cherche désormais à faire exister le Tome 2.
Vous lancez un projet de financement participatif. Quelle est la situation de l’édition de manga au Luxembourg ?
C’est très difficile pour l’auto-édition tant dans le manga que la BD. Il est presque impossible d’être correctement rémunérée pour la phase de création. Ce projet est totalement impayé durant le processus créatif. Or, en tant que freelance, j’ai tout de même des charges et factures à payer tous les mois. Le financement participatif est important car il permet de supporter les frais l’impression du livre qui n’est pas des moindres (3000€). Puis tout surplus me permettra de toucher une rémunération pour le travail fourni. Cela permet donc de sortir du sentier classique de l’édition, ou bien de devoir attendre des ventes incertaines avant de pouvoir espérer une première rémunération. Grâce au crowdfunding, il est possible de soutenir un projet en gagnant des récompenses (précommandes du livre, goodies, cadeaux, …) tout en permettant un créateur de vivre de son travail.
Pour soutenir le projet d’édition de Sabrina, sa campagne Ulule est en ligne jusqu’au 30 avril ici.
Pour en savoir, en vidéo, c’est ici.
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